Petit billet rapide en forme de cri d’alerte. Et surtout, un appel à la vigilance.
Depuis l’élection de M. Macron, et cela n’aura échappé à personne, on assiste à une véritable “Macronmania” dans la plupart des médias. Et le mot est faible. On pourrait parler de génuflexion, de soumission, d’idolâtrie, de culte, avec toute la perversion que ces comportements supposent : mauvaise foi, aveuglement, condamnation de l’adversaire, intolérance, fermeture d’esprit, obligation de communier au même dieu – Jupiter en l’occurrence – sous peine d’ostracisme et de bûcher médiatique. C’est de cela que je voudrais parler rapidement.
Inconsistance d’un Jupiter en culotte courte
Tout d’abord, je rappellerai quelques faits qui prouvent l‘aveuglement total et la mauvaise foi des médias macronophiles voire macronolâtres. De même que l’absence flagrante d’honnêteté intellectuelle et de colonne vertébrale idéologique : bref, des girouettes qui pointent là où le vent macroniste souffle.
- Le chant choral : Jacques Cheminade, candidat aux Présidentielles de “Solidarité et Progrès” prévoyait d’instaurer la pratique et l’apprentissage du chant choral en primaire. Bien sûr, immédiatement raillé, déconsidéré etc. : Le Figaro parle “d’idée farfelue” à ce propos, les qualificatifs de “fumeux”, “hurluberlu”, et autres joyeusetés n’ont pas manqué. Et pourtant, quelques temps plus tard, un certain Jean Michel Blanquer, Ministre de l’Education Nationale, annonçait sa volonté de créer une “rentrée en musique” dans les établissements scolaires car “le développement de la pratique collective de la musique est essentiel pour cette “école de la confiance” que nous allons construire ensemble”. Du Cheminade dans le texte… Gageons que M. Blanquer ne sera pas traité de “flarfelu”, de “fumeux”, ni d'”hurluberlu”…
- Poutine : pendant la campagne, les médias se sont déchaînés contre les candidats qui prônaient un dialogue avec Monsieur Poutine. Les attaques subies par Mélenchon en sont exemplaires. Quelle ne fut donc pas notre surprise de voir M. Macron inviter en grandes pompes M. Poutine à Versailles, pour… dialoguer avec lui… ! Mais là, c’était différent, tous les médias ont applaudi, car il a rappelé ses “désaccords” à M. Poutine, il a été ferme ! Qu’il est fort ce Macron ! Poutine en tremble encore…
- La Syrie : on s’en souvient là aussi, ceux qui osaient émettre l’idée selon laquelle l’éviction de Bachar al-Assad ne devait pas être la priorité de la lutte anti-terroriste, qu’il faudrait là-aussi mettre en place des relations diplomatiques minimales avec lui ont été vilipendés, calomniés, réduits à des collabos etc : “Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ont tous deux sacrifié le peuple syrien à une vision littéralement inhumaine des relations internationales” peut-on lire sur le blog du journal Le Monde. Bien sûr, pendant la campagne, le petit Emmanuel n’était pas comme ces grands méchants sans coeur, grands dieux non ! Il était gentil, lui… Et voilà t-y pas que le gentil petit Emmanuel a changé d’avis la semaine dernière en affirmant : “En Syrie, la destitution de Bachar n’est plus un préalable à tout” et “Bachar, ce n’est pas notre ennemi, c’est l’ennemi du peuple syrien.” Il faut donc, comme le disaient Mélenchon, Le Pen, Lasalle et d’autres discuter avec Bachar al-Assad. Mais quand Macron change d’avis, il s’agit d’un “aggiornamento”, pas de son incompétence pendant la campagne. Et tous les médias de s’extasier, alors qu’il s’agit rigoureusement de la même position qu’ils dénonçaient quelques semaines auparavant ! Mais là, voyez-vous, c’est du “pragmatisme”, de la “realpolitik”, il “endosse ses habits de président”… (voyez par exemple cet article de Causeur…)
Trois exemples pour illustrer l’une des composantes majeures de la pensée sectaire (voire totalitaire) : le gourou a toujours raison, même quand il change d’avis ; les opposants ont toujours tort, même quand le gourou adopte leur avis. Je vous renvoie à La ferme des animaux de George Orwell…
Macron censeur ?
Mais il est un autre comportement plus inquiétant encore… La volonté de censure et de mainmise sur l’opinion.
- Cela commence avec la lettre ouverte que des journalistes ont adressé au Président. Le 18 mai, ils dénonçaient l’Elysée qui avait choisi les journalistes habilités ou non à couvrir un déplacement officiel. “Choisir celui ou celle qui rendra compte de vos déplacements ajoute à la confusion entre communication et journalisme, et nuit à la démocratie” ajoutent-ils.
- Puis notre gentil président a ciblé Zemmour et Onfray parce que, selon lui, ils ont accaparé l’élaboration du “récit national”. Pour lutter contre les vilains “déclinistes” – pas contre le déclin, pas contre la pauvreté grandissante, pas contre le déclassement des couches populaires, pas contre la précarisation non, contre ceux qui disent que tout cela existe… – Macron entend s’entourer d’intellectuels chargé d’élaborer un contre discours officiel : Pierre Nora et Michel Serres par exemple.
- Ensuite, ce fut le tour le Natacha Polony : virée d’Europe 1 où tous les matins elle présentait une revue de presse (parmi les meilleures audiences de la matinales), virée aussi de Paris Première où l’émission Polonium réalisait aussi de bons scores. Bien sûr, N. Polony est une journaliste libre et réputée pour son honnêteté intellectuelle, mais qui a le défaut d’être particulièrement critique envers le pouvoir macroniste, et pire, d’être souverainiste.
- Poursuivons avec des journalistes de l’Agence France Presse (AFP) qui le 22 juin affirment que l’affaire Ferrand a été étouffée par la rédaction en chef de l’agence. Le Canard Enchaîné a dévoilé l’affaire le 24 mai, alors que des journalistes de l’AFP possédaient déjà les informations et auraient donc pu sortir l’affaire avant ! Les journalistes avaient informé leur rédaction qu’ils étaient en mesure de révéler ce scoop, mais cette dernière a préféré taire les informations au motif qu’elles présentaient un intérêt “trop limité”… On croit rêver ! L’annonce du renvoi de Bayrou en correctionnelle a également été étouffée par la rédaction… Retrouvez le communiqué du Syndicat National des Journaistes de l’AFP qui y fait référence, c’est assez accablant…
- Enfin, l’essayiste et soutien de Nicolas Dupont-Aignan, Jean Paul Brighelli, viré lui aussi par LePoint.fr pour qui il animait un blog. La cause ? Son “enthousiasme insuffisant” selon lui, à la vague macroniste, car il n’avait pas explicitement appelé à voter Macron contre Le Pen. Sans commentaire…
- François Bayrou, alors Garde des Sceaux, avait, on s’en souvient, appelé le directeur de la cellule d’investigation de Radio France pour se plaindre du “harcèlement” dont auraient été victimes des salariés du MoDem quant à l’affaire des emplois fictifs au Parlement Européen. Bien sûr, M. Bayrou nous assure que son intention n’était absolument pas de faire pression, ni encore moins d’intimider le journaliste. Le Premier Ministre et le porte parole du gouvernement, Christophe Castaner avaient immédiatement réagi pour recadrer Bayrou. Dont acte.
- Par contre, Monsieur Castaner n’a pas fait preuve de la même intransigeance vis-à-vis de Muriel Pénicaud, Ministre du Travail chargée de porter la nouvelle Loi travail par ordonnance. En effet, celle-ci est aussi visée par une affaire. Lors d’une convention à Las Vegas en 2016 organisée par Emmanuel Macron (du temps où, Ministre de l’Economie, il utilisait son statut et sa fonction pour promouvoir sa propre campagne personnelle), le marché – juteux – de plus de 380 000 euros avait été obtenu par la société de Mme Pénicaud (Business France) sans appel d’offre. Troublant… Et pourtant, alors qu’il eût été de bon ton d’enquêter sur cette “affaire” pour en dénoncer les abus potentiels et faire surgir la vérité, Monsieur Castaner a, le 28 juin, au contraire, exhorté les journalistes à “ne pas chercher à affaiblir Muriel Pénicaud, Ministre du Travail”. En clair : arrêtez d’enquêter sur cette affaire pour nous laisser le champ libre et nous permettre de faire passer tranquillement nos réformes. Encore plus clair : Castaner en appelle à une presse à géométrie variable…
- La litanie se poursuit : le 26 juin, la dernière phrase d’un article du journal Les Echos a été censurée par la Rédaction en chef du journal. Quelle phrase ? Michel Broué, mathématicien écrivait alors : “J’espère de tout cœur que l’Assemblée Nationale acceptera la lavallière de Villani et la non-cravate de Ruffin”. Or, la référence – plutôt positive en l’occurrence – à Monsieur Ruffin, n’a visiblement pas été du goût du groupe LVMH, propriétaire du journal. En effet, Ruffin s’était, entre autre, illustré par un documentaire contre Bernard Arnaud, directeur – et milliardaire – de LVMH… et soutien officiel d’Emmanuel Macron ! La Société des Journalistes s’est indignée de cette censure, rappelant la nécessité de “l’indépendance de la rédaction”.
- Enfin, je terminerai par une anecdote qui en dit long sur le rapport du nouveau Président et des médias. Lundi 3 juillet 2017, le Président parlera devant le Congrès réuni à Versailles, la veille du discours de politique générale du Premier Ministre à l’Assemblée Nationale. Une manière grossière de reléguer le Premier Ministre à la simple fonction d’exécutant… Un vulgaire tâcheron. M. Macron veut, selon l’Elysée “s’adresser aux français”. Mais pas question de dialogue pour autant, car il n’y aura aucun débat avec les parlementaires ni avec les journalistes. Un soliloque, un monologue, un bel exercice d’égotisme, de rhétorique autiste, un coup de com’, une homélie chargée de diffuser la bonne parole, un prêche en chaire républicaine afin de convertir les foules à la vérité révélée, au dogme macronien et politiquement correct – mais intellectuellement indigent, insipide, navrant de bêtise… Car ce discours au Parlement remplacera la traditionnelle interview du 14 Juillet accordée à des journalistes. Je rappelle que depuis son élection, Macron n’a accordé qu’une seule interview, et en présence de très nombreux médias, histoire de diluer les questions qui pourraient fâcher. La raison ? La “pensée complexe” du Président, dixit l’Elysée… A mourir de rire… Ou a pleurer…
Communiqué du Ministère de l’Education Nationale sur la “rentrée en musique” (cliquez pour agrandir)
Il faut lire et relire ce livre, encore et toujours…
Zemmour et Onfray visés par l’Elysée (cliquez pour agrandir)
La journaliste Natacha Polony
Jean-Paul Brighelli
Christophe Castaner, Porte Parole du Gouvernement
Communique du SNP des Echos (cliquez pour agrandir)
Si le totalitarisme désigne un pouvoir dans lequel la presse est sous contrôle, muselée, destinée exclusivement a faire l’éloge du grand homme, où le pouvoir refuse tout dialogue pour y substituer la parole providentielle irréfutable, où les pensées contradictoires sont progressivement évincées, où les discours alternatifs sont stigmatisés et où l’on fait taire les opposants ; un frisson nous traverse, et le doute nous assaille. Ne serions-nous pas, comme le disait Coluche, “sur une pente savonneuse” ?